Metteur en scène : Abdellatif Baybay
Création sonore : Emmanuel Six et Grégory David
Création lumière : Bruno Teutsch
Musicien : Thierry Mabon
Comédien : Patrice Connard
Danseuse : Annabelle Tison
Le poème de Mallarmé
De même qu’avec son Carré noir sur fond blanc Malévitch recommence la peinture pour sauver la peinture, Mallarmé tente de recommencer la poésie pour la sauver de l’anéantissement. Et pour achever son dessein, il brûle tous ses vaisseaux, il abandonne le vers. Il emprunte à la musique autant qu’aux arts plastiques ; il invente un dispositif inédit dont l’exécution ressortirait à ce qu’il est aujourd’hui convenu d’appeler la performance : une œuvre dont le dispositif expérimenterait une manière nouvelle de mobiliser les sens et l’intellect, une œuvre aussi dont l’existence, et c’est là sa victoire, exédrait le moment de l’exécution – fût-elle tout intérieure – pour se survivre dans la mémoire comme cette constellation qui, magnifique, s’inscrit sur la page finale du texte. « Rien n’aura eu lieu que le lieu » postule Mallarmé ; cette tautologie serait l’aveu d’un échec si ne subsistait après la cérémonie le souvenir de ce lieu et du drame qui a pu s’y jouer, si se souvenir ne portait aussi le désir de rejouer ce drame qui est celui de tous les hommes.
Bref, chaque coup de dés est un appel à relancer les dés.
Note d’intention
Rien n’aura eu lieu que le lieu
“il y a”
y : le lieu, le topos, l’espace de l’avoir lieu.
Dans « Un Coup de dé », Mallarmé explore, notamment, la dimension spatiale, plastique du langage poétique, en brouillant au final les repères entre le plan et la page, le poème et le tableau. Entre les blancs et les silences , la prosodie et la partition musicale.
Cette création tentera de saisir cette multicité de formes non pour recouvrir ces territoires mais, bien au contraire pour souligner la frontière de chaque espace convoité, ainsi chaque objet apparaîtra par le négatif de l’autre, de même que des agents chimiques ne révèlent une part inconnue de leurs propriétés que lorsqu’ils se trouvent associés à d’autres.
Mallarmé se prêtera à l’alchimie poétique.
Or, le poète connait la fragilité, la volatilité, la précarité du mot condamné à être étymologique. Il connait les limites du verbe voué à l’usure inhérente à l’usage…À faire sens par le signe,signifié,signifiant. Insuffisant .
« on sait que tout l’effort de Mallarmé a porté sur une destruction du langage, dont la Littérature ne serait en quelque sorte que le cadavre ». Barthes, Le Degré zéro de l’écriture, 1953
Il construisait en effet une généalogie de l’opacification graduelle du signe.
Le mot al-zahr en arabe, signifie « coup de dés »,
Un coup de dés jamais n’abolira le hasard
Ainsi, Le poème se déploie sous une multitude de formes pour mieux se clore sur lui-même.
Un poème comme une magnifique impasse.
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