Leçons de Milan, Tadeusz Kantor
Il s’agit d’un voyage, ou plutôt de l’errance intérieure de l’Acteur. Un retour impossible aux origines/ essence du théâtre où face au spectateur apparaît l’homme qui lui est exactement semblable et pourtant infiniment étrange. Comme si pour la première fois le spectateur se voyait lui-même. Un reflet troublant où les émotions de l’Acteur fusionnent avec celles du spectateur, qui attend. Il vient au théâtre avec cette attente…Attente de quoi ? D’être bouleversé ? D’être saisi par un sentiment inconnu jusqu’à alors, mais pressenti comme une possibilité par un étrange tressaillement du fond de l’âme ? D’être surpris, d’être ébranlé par la vérité ? Ou s’agit-il peut-être de cette attente qui est la condition même de notre vie ? Cette attente, la plus importante, devant la porte derrière laquelle se cache le pressentiment de l’infini.
L’Acteur – messager. L’Acteur passeur de la mémoire car il a visité d’autres mondes, il en est revenu et maintenant à travers son vécu, il nous livre le secret d’au –delà. En explorant sa mémoire, en continuant l’effacement du « rôle », il cherche les états de l’Attente, de la Pure Présence. Il doit tendre vers son impossible. Les niveaux de sa présence en transformation sont :
L’acteur impossible
L’acteur sur le seuil
L’acteur intérieur
L’acteur de la mémoire
L’acteur – œuvre d’art
Il doit montrer en toute sincérité, en toute pureté son moi profond devant le spectateur. L’Acteur prend le risque de monter sur scène.
Et puis derrière cette recherche il y a l’histoire de Rebeka. Nous l’avons rencontré deux fois. D’abord il y avait le texte d’une chanson tango polonais de 1931, intitulé Rebeka. Cette jeune femme qui attend arrivé de son prince charmant qui va l’emmener loin de là où elle est. Et lors ce rêve se réalise, lors celui tant rêvé, tant espéré va l’emmener loin – nous allons la rencontrer encore une fois. Elle sera vieille, abimée, brisée par la vie, sans illusions, accompagnée juste par une pensée obsédante – sauver l’âme de ses sœurs, leur permettre dignement traverser le seuil de la vie. Vieille Rebeka Freedeman, qui lave soigneusement les corps en les préparant pour l’enterrement, en lisant sur les peaux l’histoire de leur vie, celles comme elle, qui séduites par la promesse d’une vie meilleure, par promesse d’amour rêvé, se sont retrouvées sur le trottoir de l’existence humaine.
Rebeka pourrait être notre mère…
Le collectif Le Retour d’Ulysse
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