Se savoir et se voir aux prises avec la vitre, l’humain aurait-il seulement ça de plus que l’insecte ?
D’où sommes-nous partis ? Quel est ce chemin qui toujours nous ramène à cette vitre, cette buée ?
Et puis qu’avons nous fait de cette part d’ivresse pure et maudite d’où suinte depuis si longtemps nos désirs les plus cruels ? Toujours elle nous fit peur et honte. Notre besoin de la contraindre nous fit découvrir l’emploie de la vapeur, des hydrocarbures et plus tard de l’uranium pour atteindre au plaisir impérial de la vitesse ? 1
Du haut de ces désirs et d’une science suffisante jusqu’à la bêtise, des hommes prenaient la mer et violaient l’innocence, n’apportant qu’uniforme désordre ordonné d’hommes armés et serviles.
Cette »renaissance » que Rabelais déjà condamnait, n’avait d’autre but que la satisfaction immédiate des intérêts mercantiles d’une minorité de possédant et de leurs serviteurs. Pour ce faire il fallait que d’autres hommes et d’autres femmes soient considérés comme des « Sauvages”2 Ceux-là longtemps considéré comme des soushommes sont encore de nos jours débusqués et chassés par une pathologie expansive et démesurée !
Faire théâtre de cette pathologie, s’inspirer d’une mythologie qui reste comme la mythologie Grec un véritable kaléidoscope de l’âme humaine.
À partir de la Genèse nous interrogerons l’histoire de deux frères et deux soeurs, Rachel, Léa, Jacob et Esaü, nous chercherons à extraire de la bouche du langage ces germes qui n’ont cessé de prospérer jusqu’à nos jours.
Faire signe vers une fuite possible, vers une autre boue, un autre silence, mais sans dire et encore moins agir une « solution ».
À partir de ces mots qui furent en d’autres temps organisés en alphabet, nous écrirons de nouveaux textes, nous chercherons à organiser des écrits pour cet aujourd’hui trop clair, trop aveuglant !
Nous chercherons à mettre en geste, en espace en danse un autre verbe, une autre parole. Nous chercherons un théâtre qui ne sera pas que dans la lumière, qui ne sera pas assujettis à une industrie culturelle et à ses avatars artisanaux.
Nous chercherons à reprendre si cela est encore possible les mots de Claude Régy qui parlait de coproduire l’imaginaire d’un texte avec les spectateurs et ainsi qu’ils puissent y aborder leurs propres mondes.
Seiji Murayama et moi-même travaillerons sur le silence et son écoute sur les marches et leurs rythmes (ou non rythme).
Nous aborderons avec quatre actrices et acteurs les contraintes du tout et du rien, la lenteur, le vide, le vouloir le non-vouloir, la matière silencieuse du texte…
Nous aborderons la voix et son écoute dans l’espace et dans le son. Nous utiliserons la lecture, la mémoire,
l’improvisation et sa remémoration.
Nous aborderons le grotesque qui se fonde sur des contrastes, sur le déplacement constant des niveaux de perception, sur l’antagonisme du fond et de la forme.
Le grotesque dit Meyerhold « cache des éléments de danse ». Dans la danse et sa sphère rythmique au travers des micros et macros mouvements, l’actrice et l’acteur expriment le grotesque du corps humain, ils dansent le tragi-grotesque du drame humain.
Sur la scène il y aura des rideaux, des découvertes où se cacher à moitié ou complètement. Ces pendrillons posés de façon aléatoire, pourront être appuyer ou charger à l’envie. Les acteurs pourront en surgir la main dressée comme des Césars. Ils découvriront ou couvriront les intimités, les nudités et les trafics…
Une scénographie pour se donner à voir, se regardant regarder l’invisible qui regarde derrière les miroirs, les glaces où coulent les couloirs, les galeries infinies, vers les fins fonds de nos mémoires…
Dominique Collignon Maurin
1 La part maudite George Bataille
2 Des hommes que l’on appel sauvage Alain Gheerbrant
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